Entretien avec Me Claude Kokou AMEGAN, le nouveau président du CACIT

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 Le nouveau président du CACIT, Me Claude Kokou AMEGAN, revient dans cet entretien entre autres sur  les grands chantiers durant son  mandat. Lisez

Bonjour Me Claude AMEGAN, nous aimerions mieux vous connaitre

Vous l’avez dit (rire), je suis Me Claude Kokou AMEGAN, avocat au barreau du Togo, membre du Conseil de l’ordre des avocats, membre du collectif des avocats du CACIT et récemment élu président du CACIT. Pour m’en tenir à l’essentiel.

Maître Claude AMEGAN, le 16 novembre passé, à l’issue de l’assemblée générale élective, vous avez donc été élu, nouveau Président du Conseil d’Administration (PCA) du CACIT. Quel est le sentiment qui vous amine ?

D’abord, je voudrais rendre grâce à Dieu pour le chemin parcouru par le CACIT et saluer la combativité et le courage de mes prédécesseurs et de tous les acteurs passés et présents qui ont travaillé et continuent de travailler pour l’essor du CACIT et pour la sauvegarde des droits de l’Homme.

Ensuite, je voudrais exprimer toute ma reconnaissance aux membres du collectif pour la confiance qu’ils ont placée en ma modeste personne.

Enfin, naturellement c’est un sentiment de joie d’être élu comme nouveau PCA, mais aussi un sentiment qui se nourrit de la volonté de relever, avec toutes les bonnes volontés, les défis présents et à venir pour renforcer la place du CACIT au sein de la société civile togolaise.

Avec votre élection, vous êtes le troisième président du CACIT, c’est dire que le CACIT vient de confirmer sa maturité démocratique, quel est votre regard sur le processus électoral qui a conduit à votre élection ?

Le CACIT est une grande organisation, crée depuis 2006. C’est dire qu’il y a 13 ans que l’organisation existe. Le CACIT a fait beaucoup d’efforts au niveau de l’assise institutionnelle. C’est pourquoi, je ne suis pas surpris de cette maturité démocratique. Les élections se sont déroulées conformément aux dispositions statutaires. C’est aussi important de procéder à des changements au sein de la société civile. Nous devons faire montre de l’esprit démocratique en donnant l’exemple. J’ai un mandat de trois ans renouvelable une fois, si je souhaite candidater une fois encore. J’espère assumer cette responsabilité avec mes autres collègues du Conseil d’Administration (CA), avec abnégation pour l’amélioration de la situation des droits de l’Homme et de la gouvernance en vue de la consolidation de l’État de droit et de la démocratie au Togo.

Quels seront vos grands chantiers durant votre mandat ?

D’abord, nous entendons soutenir la direction exécutive dans son élan formidable. Nous devons renforcer le professionnalisme dans l’impartialité et en toute indépendance. Nous allons œuvrer pour le renforcement de notre collaboration avec tous les acteurs pertinents notamment, les autres organisations de la société civile, le gouvernement, les partenaires techniques et financiers mais aussi contribuer à nouer de nouveaux partenariats.

Ensuite, le renforcement du CACIT nécessite aussi des actions impliquant de plus en plus les membres du réseau. Il nous faudra travailler à consolider l’esprit d’appartenance au réseau. Ceci passe par la garantie de l’autonomie des associations membres mais aussi il est nécessaire de trouver des moyens appropriés pour une forte implication dans la vie du réseau. C’est dans cette dynamique que le poste de chargé de réseautage est créé au niveau du CA.

Enfin, il faudra, avec cette synergie, soutenir de manière plus accrue l’accompagnement du gouvernement dans la mise en œuvre de ses engagements nationaux et internationaux en matière des droits de l’Homme et de la bonne gouvernance au Togo. Parmi les défis majeurs, l’on peut citer la lutte contre l’impunité des actes de violations des droits de l’Homme et de corruption l’accès à l’information, le renforcement de la participation de la société civile à la définition des politiques et programmes, l’effectivité de l’indépendance de la justice et la réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à la santé, à une alimentation saine et de qualité, l’accès à l’eau potable… Nous entendons renforcer l’implication du CACIT sur le processus de la justice transitionnelle, la lutte contre la torture et l’extrémisme violent. Notre accompagnement visera donc le Plan National de Développement (PND) et par ricochet les Objectifs du Développement Durable (ODD) sous l’angle du droit.

Nous avons pu découvrir que le CACIT a déjà, sous la conduite du président sortant, amorcé le pas vers une démarche régionale pour répondre aux défis précités. Le CACIT est devenu une organisation avec une ambition régionale axée notamment sur la mise à disposition d’informations crédibles nourries de la pratique et inscrite dans une démarche scientifique. Le Collectif pourra compter sur notre mandat pour renforcer le pool recherche, orienté vers une dynamique régionale, à l’instar d’autres organisations internationales qui ont déjà fait leurs preuves.

Revenons sur le programme régional : nous avons constaté depuis ces trois (03) dernières années que le CACIT a un programme régional, peut-on avoir une idée sur les motivations de cette initiative ?

Vous savez, le CACIT a 13 ans d’existence, j’allais dire d’expérience, il a travaillé depuis sur le plan national. Pour la mise en œuvre de ses activités, le CACIT s’appuie sur ses points focaux qui se trouvent dans toutes les villes du pays, une antenne régionale vient d’être créée à Kara pour la zone septentrionale.

De plus en plus, il y a des exigences régionales et défis communs sur le plan africain, notamment pour le respect des droits de l’Homme et la gouvernance. Pour trouver des solutions au plan national, l’approche régionale devient une nécessité.

Par exemple dans le domaine de la lutte contre la torture, nous disposons depuis février 2019, d’un groupe d’intervention judiciaire SOS torture en Afrique. D’ailleurs, la première rencontre de ce groupe a eu lieu à Lomé en avril 2019. C’est un groupe de seize (16) avocats africains qui accompagnent les victimes de torture afin d’obtenir réparation devant les juridictions nationale, régionales et internationales.

Un autre Groupe de travail sur la vulnérabilité des personnes en mouvement en Afrique vient d’être crée, sa première rencontre aura lieu du 16 au 17 décembre 2019 à Lomé. Ces deux groupes sont coordonnés par le CACIT en collaboration avec l’OMCT dans le cadre du Réseau SOS Torture.

D’autres programmes et actions au plan africain sont aussi en cours et seront renforcés durant notre mandat pour l’amélioration de la situation des droits de l’Homme et de la gouvernance au Togo et en Afrique.

Dans le cadre du positionnement du CACIT on vous accuse parfois à tort ou à raison des deux bords (pouvoir et opposition) de prendre parti pour un bord, qu’en dites-vous?

Au Togo, on pense toujours que quand tu n’es pas proche du pouvoir, tu es proche de l’opposition et vice versa. Mais c’est aussi l’histoire politique de notre pays qui met certaines consciences dans cet état d’esprit. Le CACIT a eu un long chemin pour arriver à avoir les acquis liés à l’impartialité indispensable au travail de défenseur des droits de l’Homme, si l’on se réfère à la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’Homme.

Le CACIT collabore avec le gouvernement dans le cadre de la mise en œuvre des droits de l’Homme, comment compter vous renforcer cette collaboration avec le gouvernement ?

L’État est un acteur de premier plan, en réalité c’est l’État qui met en œuvre les droits de l’Homme. Au nom des engagements internationaux qu’il a pris, l’État se doit de promouvoir et protéger les droits de l’Homme et les libertés publiques fondamentales.

Nous, en tant qu’acteurs de la société civile, notre mandat consiste à faire le contrôle citoyen de l’action publique. Nous prenons soin de faire le suivi des politiques publiques, des engagements internationaux, des recommandations ou observations finales des mécanismes de protection des droits de l’Homme. Ceci peut passer par des contributions constructives à la définition des politiques et programmes, des monitorings, des actions de plaidoyers et aussi des dénonciations et des soumissions de plaintes. Tout ceci, doit se faire dans le professionnalisme et dans le respect des textes légaux.

Monsieur le Président, aujourd’hui c’est le 10 décembre, Journée Internationale des droits de l’Homme, quelle est votre lecture de la situation des droits de l’Homme au Togo, en Afrique et dans le monde?

Tout d’abord permettez-moi de saluer l’élection du Togo au poste de vice-présidence du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, qui court à partir de janvier 2020 pour une année. Cette reconnaissance internationale est un atout pour notre pays, mais aussi une invite à relever les défis majeurs précités.

C’est dire que les défis susmentionnés retracent la situation d’ensemble des droits de l’Homme au Togo. Sur le continent, les problématiques liées à la migration, à l’extrémisme violent et au terrorisme retiennent notre attention. Sur le plan mondial, je ferai référence à la déclaration faite dans le cadre de cette célébration par Mme Michelle BACHELET, Haute Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme qui fait mention de « l’urgence climatique mondiale comme la plus grande menace pour les droits de l’Homme à l’échelle planétaire ».

Vous êtes aussi membre du collectif des avocats du CACIT, quels sont les défis liés à ce travail ?

Le premier défi est l’instruction des plaintes déposées au plan national. Au-delà des cas de 2005 qui sont largement connus, le CACIT a récemment transmis 32 plaintes d’allégations de violations des droits de l’Homme et de torture à qui de droit. Notre espoir est que ces plaintes soient instruites. La mise en œuvre des décisions de la Cour de justice de la CEDEAO reste aussi un grand défi à relever, même s’il faut reconnaître des avancées, notamment des cas d’indemnisations. Il revient à l’État d’aller au bout de cette logique en poursuivant les réparations et en punissant les auteurs.

Je voudrais souligner la nécessité d’une franche et sincère collaboration entre les organisations de la société civile si nous voulons accompagner les présumées victimes à obtenir justice.

Votre mot de fin

Le gouvernement a annoncé la tenue de la prochaine élection présidentielle pour le 22 février 2020. Notre espoir est que ces élections aient l’assentiment de tous les acteurs et que les conditions d’organisations garantissent la transparence dans le respect des valeurs démocratiques.

Je finirai en témoignant, une fois encore, toute ma reconnaissance à tous mes prédécesseurs et à toutes les équipes qui ont su mettre en œuvre leurs orientations pour faire du CACIT l’organisation qu’elle est actuellement. Beaucoup de chantiers ont été réalisés, d’autres sont en cours et j’espère pouvoir par la grâce de Dieu contribuer à leur réalisation pour le bien-être de nos populations. Je vous remercie

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